Exposé par Robert Delpire au Centre National de la Photographie (Palais de Tokyo à Paris) en 1991 et publié dans la collection « Photo Poche », le fonds photographique de Norbert Ghisoland (40 000 plaques conservées) a été revisité pour cette exposition par son petit fils Marc, lui aussi photographe et co-commissaire du projet avec la journaliste belge Mary Van Eupen.
« Les photos de Ghisoland sont vraiment étonnantes. Elles n’ont pas le seul intérêt kitsch des cartes postales de 1900 : elles ont une valeur historique et sociale. Car Ghisoland n’est pas le reproducteur du visage de la bourgeoisie. Ses clients sont des mineurs, de ces hommes au visage buté, impénétrables, à la fois fiers et modestes. Non pas photos d’identité sociale, mais photos-rêves et souvenirs pour lesquels on pose dans son costume favori […]. Photos de famille, portraits de groupes, photos d’enfants : il y a beaucoup à lire dans ces visages. La résignation, l’envie, la soumission, la peur d’une vie de qualité, mais aussi le plaisir de la séance de pose, de l’évasion sociale procurée par cette sorte de mascarade. […] Toutes ses photos d’ailleurs très belles ne font pas rire. Certaines ont l’émotion de drames sous-jacents. Pour une fois, le photographe n’a pas demandé de sourire. Derrière la céramique de la façade de sa boutique fumaient les grandes cheminées. »
(Hervé Guibert, « Graves mascarades », Le Monde, 02 mars 1978)
Extrait de la critique publiée dans le Monde par Hervé Guibert lors de la sortie du premier livre sur Norbert Ghisoland en 1977, ce texte résume de façon parfaite l’œuvre de celui qui, fils de mineur, tient pendant quatre décennies son studio dans une petite ville minière de Belgique. Il reçoit la population ouvrière locale qui, sous la grande verrière, échappait le temps d’une pose et d’un costume à la noirceur du quotidien.
Vues de l’exposition