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Fastenaekens Gilbert
Le Havre, France
série « Nocturne »
1982

61,7 × 71,7 cm
tirage noir et blanc argentique contrecollé sur carton

1995
achat à Arts - recherche photographique
inv. 1995.2.1
© Gilbert Fastenaekens

 

Depuis le début des années 1980, Gilbert Fastenaekens développe un travail en profondeur sur la ville, rapidement reconnu par les institutions puisqu’il participe notamment à la première mission photographique de la DATAR (Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale) en France, entre 1984 et 1985. Très vite, son intérêt se porte sur les paysages urbains, en particulier les friches industrielles, les habitations en ruine, les zones périurbaines, les espaces ignorés des regards et marginalisés. Ceux-ci vont devenir ses sujets de prédilections, qu’il capture essentiellement la nuit sous les lumières artificielles de la ville. Il commence par sillonner Bruxelles, sa ville natale, avant de parcourir les villes d’Europe, où il pose les premiers jalons de sa série « Nocturnes1 » (1980-1987). Issue de cette série emblématique, cette photographie a été prise à l’angle d’une rue faiblement éclairée de la ville du Havre en 1982. Le regard se pose très vite sur l’immeuble au premier plan, sur lequel l’ombre projetée d’une fenêtre à barreaux se dessine. L’ombre s’étire le long du mur, à l’instar du temps de pose de l’appareil photographique et de la nuit elle-même. L’exploration de la thématique de la nuit lui a d’ailleurs permis de travailler dans ses photographies la puissance évocatrice de la lumière, sculptant les volumes des architectures et renforçant leur présence physique. L’atmosphère silencieuse de la ville repose ici sur les jeux d’ombre et de lumière qui se déploient dans l’image. Elle est accentuée par la présence du mur aveugle au premier plan et celle des fenêtres fermées et emmurées visibles à l’arrière. Bien que la couleur ne soit pas totalement absente de son travail, le photographe développe la plupart de ses images dans une palette très riche de gris, afin de rendre fidèlement les détails des volumes et les textures des surfaces. À travers cette série, Gilbert Fastenaekens s’inscrit dans une histoire esthétique, et non seulement technique, de la photographie de nuit. Mais contrairement à l’un de ses plus grands représentants, Brassaï, qui s’intéresse aux rues animées de Paris dans les années 1930, Gilbert Fastenaekens transforme la ville en un somptueux décor, déserté de ces principaux acteurs2.

1 : La série a été publié dans le double ouvrage Nocturnes ; Essai pour une archéologie imaginaire, Bruxelles, Galerie Catherine Mayeur ; Montigny, Le Fennec, 1993.
2 : Pour la comparaison entre Brassaï et Gilbert Fastenaekens, voir : Jean-François Chevrier, « Gilbert Fastenaekens, noctambule », Artpress, octobre 1985, n° 96, p. 15-17.

Vincent Raoul

 

Expositions

· Résonances. La collection de L’Imagerie, Lannion, L’Imagerie, 24 juin – 28 octobre 2023